CHIROPTÈRES

CHIROPTÈRES
CHIROPTÈRES

Les Chiroptères ou Chauves-Souris constituent un ordre de Mammifères euthériens remarquablement adaptés au vol. Une membrane alaire, ou patagium, constituée par une duplicature de la peau, relie les membres, et parfois la queue, au corps. Leur denture rappelle de très près celle des Insectivores, dont ils se sont sans doute isolés à partir d’une souche commune. Les premières Chauves-Souris apparaissent au milieu de l’Éocène. Les femelles, pourvues d’une seule paire de mamelles, mettent le plus souvent un seul petit au monde, les naissances gémellaires n’étant guère plus fréquentes que dans l’espèce humaine. La taille de la plupart des Chiroptères n’excède pas celle d’un rat, mais le géant du groupe, représenté par une espèce de Java, Pteropus vampyrus , atteint 1,40 m d’envergure. Le régime alimentaire est le plus souvent insectivore, parfois frugivore, carnivore ou piscivore. Trois espèces sud-américaines sont hématophages. L’activité des Chauves-Souris est essentiellement nocturne. Remarquablement équipés pour l’émission et la réception des ultra-sons, ces animaux évitent les obstacles et repèrent leurs proies en vol par un système d’écholocation. Environ un millier d’espèces peuplent la totalité du globe, à l’exception des régions polaires.

Anatomie d’un type: murin commun («Myotis myotis»)

Cette espèce très commune peut atteindre 35 cm d’envergure. Le corps est revêtu d’une fourrure douce et molle. La peau est riche en glandes sébacées, cependant que les glandes sudoripares en sont absentes.

Le squelette du crâne, assez allongé, ne présente pas de séparation entre l’orbite et la fosse temporale. La denture est du type insectivore: les molaires présentent un relief en W (dilambdodonte) très caractéristique, les canines sont développées en crocs, les incisives sont styliformes.

Les membres antérieurs sont profondément modifiés par l’adaptation au vol. L’ensemble du bras a effectué une rotation de 900 par rapport à la position qu’il occupe chez un Mammifère quadrupède; l’articulation avec l’omoplate s’effectue sur le côté externe de celle-ci, la cavité glénoïde étant dirigée vers l’extérieur. Humérus et radius sont remarquablement allongés; le cubitus incomplet est partiellement fusionné avec le radius. Au carpe, un os spécial, le transverse, vient s’adjoindre aux deux rangées habituelles. Les métacarpiens II à V, très longs, atteignent la taille de l’humérus; les phalanges des doigts III, IV et V sont aussi longues et fines. Le pouce, qui n’est pas englobé dans la membrane alaire, reste de dimension modeste; terminé par une griffe, il participe à l’accrochage. Au membre postérieur, le fémur fait un angle de 900 avec la colonne vertébrale. Le calcanéum porte une longue apophyse servant d’insertion au patagium et les cinq métatarsiens, relativement courts, sont prolongés par cinq orteils subégaux terminés par des griffes crochues qui permettent à l’animal de demeurer suspendu au repos, tête en bas. La traction exercée par le poids de l’animal bloque, dans une gaine membraneuse, le tendon rétracteur des griffes, assurant ainsi un accrochage passif. La membrane alaire relie les membres antérieurs au corps, aux membres postérieurs et à la queue. Remarquablement équipée en récepteurs tactiles, l’aile des Chauves-Souris a une sensibilité comparable à celle d’une main de Primate.

Le cerveau, bien développé, est, comme chez beaucoup de Mammifères, de petite taille, dépourvu de circonvolutions. L’appareil auditif est particulièrement évolué; le pavillon de l’oreille externe chez le murin, comme chez beaucoup d’autres espèces, se complique d’un tragus en languette.

Les organes génitaux mâles présentent des testicules intra-abdominaux en période de repos sexuel, mais ceux-ci descendent dans un scrotum temporaire en phase de reproduction. Les femelles, après une gravidité de 50 à 60 jours, mettent bas un jeune unique.

Biologie et comportement

Vol et écholocation

Les Chauves-Souris ont une activité nocturne et parfois crépusculaire; les espèces – ce sont les plus nombreuses – qui se nourrissent d’insectes les repèrent en vol et dans l’obscurité, par un système d’écholocation très perfectionné qui leur permet aussi d’éviter les obstacles. Les ultra-sons peuvent être émis à une cadence de 200 par seconde, avec une fréquence de 50 à 120 kilocycles par seconde, d’une durée très courte, souvent de l’ordre de la milliseconde.

Les types et les modes d’émission des ultra-sons sont très variables suivant les genres et même les espèces. Chez les Vespertilionidae , des membranes spéciales du larynx constituent l’organe émetteur. Beaucoup d’espèces ont des appendices nasaux, de formes variées, parfois très développés, jouant un rôle dans la modulation des ultra-sons. Les ultra-sons réfléchis par la proie, ou l’obstacle, sont captés par les pavillons auditifs, très souvent de grande taille, et renseignent l’animal avec une extrême rapidité sur la distance qui le sépare de son but.

Le vol est plus ou moins rapide, plus ou moins efficace aussi, suivant la forme et la surface portante des ailes. Les Rhinolophes, aux ailes courtes, ont un vol malhabile et hésitant, cependant que la noctule, aux ailes longues et effilées, peut planer et atteindre parfois une vitesse de 50 km/h. Le record de vitesse appartient sans doute à une espèce américaine, Tadarida brasiliensis , chez laquelle une vitesse voisine de 100 km/h a pu être enregistrée. Ses migrations se font du Texas, où a lieu au printemps la mise bas, au Mexique, où les femelles surtout viennent en automne pour hiberner. Beaucoup d’autres espèces effectuent des migrations de moindre importance. Cependant, les noctules européennes, par exemple, parcourent parfois plus de 2 000 km, alors que le murin commun passe souvent l’hiver à plus de 200 km de son lieu de séjour estival. Des expériences incontestables ont montré chez les Chiroptères une capacité d’orientation lointaine analogue à celle des pigeons voyageurs.

Biologie sexuelle et vie sociale

La biologie sexuelle des Chauves-Souris est surtout remarquable par le rythme annuel de la reproduction, la fécondation différée de l’œuf et la ségrégation des sexes, très fréquente hors des périodes de reproduction. La plupart des espèces n’ont, en effet, qu’un seul œstrus par an. Chez les Rhinolophes et les Vespertilions, où l’accouchement a lieu en automne, le sperme est conservé vivant dans le tractus génital de la femelle jusqu’au printemps, où s’effectue la ponte ovulaire et la fécondation. La gestation proprement dite est d’une durée variable; elle est par exemple de 45 jours chez la pipistrelle, mais atteint 5 à 6 mois chez les grands Pteropus tropicaux. Très fréquemment, enfin, on trouve dans les grottes et autres lieux de séjour des colonies composées exclusivement de mâles ou de femelles; ainsi en est-il des grands Rhinolophes et de la plupart des Vespertilionidae , chez lesquels les femelles constituent d’avril à juillet des colonies de mise bas dont les mâles sont exclus.

La vie sociale est un fait très général chez les Chiroptères: rares sont les espèces solitaires. Le nombre d’individus rassemblés dans une grotte peut parfois atteindre des chiffres considérables: 500 000 Hipposideros caffer ont été dénombrés dans une grotte au Gabon, 20 millions de Tadarida brasiliensis aux Carlsbad Caverns au New Mexico. Les cavités souterraines sont évidemment des lieux de rassemblement privilégiés pour des populations aussi nombreuses, mais les groupes beaucoup plus restreints que forment d’autres espèces établissent leur gîte diurne dans les arbres, les rochers, les terriers et surtout, à la campagne, dans les constructions humaines habitées ou en ruine. La présence des Chauves-Souris auprès de l’homme est d’une telle fréquence que l’on parle souvent de synanthropie pour désigner ce trait commun d’association.

Régime alimentaire

Les Chauves-Souris montrent une grande diversité de régimes alimentaires. La totalité des espèces des régions tempérées sont insectivores et constituent par là même de précieux auxiliaires pour l’homme. Un petit Chiroptère détruit, estime-t-on, 1 000 insectes par nuit de chasse. Après avoir été détecté par écholocation, l’insecte est ramassé au moyen de l’aile, agissant à la façon d’une épuisette, puis ramené dans la partie caudale du patagium où il est saisi par les mâchoires. Beaucoup d’espèces tropicales et notamment les grands Ptéropidés du sud de l’Asie, d’Australie, du Japon, de Madagascar sont frugivores et causent de sérieux dégâts aux vergers. Quelques espèces mexicaines, d’une part, et malaisiennes, d’autre part, sont pollinivores et nectarivores; certaines plantes dépendent de ces Chauves-Souris pour leur pollinisation. On connaît des espèces tropicales carnivores qui dévorent grenouilles, geckos, petits oiseaux et mammifères comme le mégaderme lyre de l’Inde. Deux espèces américaines et une asiatique sont strictement piscivores. Enfin, trois espèces d’Amérique tropicale sont hématophages: les vampires ont une adaptation buccale permettant le prélèvement du sang chez les ânes, chevaux, bovidés et éventuellement les hommes. Les incisives supérieures en forme de gouge servent à perforer l’épiderme, la langue se rabat sur les lèvres inférieures en formant une sorte de gouttière par laquelle le sang est aspiré. La salive contient une substance anticoagulante.

Hibernation

Un dernier trait remarquable de la biologie des Chiroptères mérite d’être évoqué: leur aptitude à l’hibernation. En relation avec l’absence d’insectes actifs durant la période froide, les Chauves-Souris entomophages, des régions tempérées surtout, ont un sommeil hivernal qui peut durer plusieurs mois. Un abaissement excessif de la température ambiante fait parfois sortir les animaux de leur léthargie. Durant la période d’hibernation, une perte considérable de poids et un abaissement de la température interne sont les faits les plus notables.

Rôle économique

Quelques espèces de Chauves-Souris, surtout tropicales, sont nuisibles, soit qu’elles attaquent les vergers où elles se nourrissent de fruits, soit qu’elles servent de vecteurs pour divers germes pathogènes (trypanosomes et virus, par exemple). Des épidémies de rage dans les troupeaux d’Amérique du Sud ont pu être imputées à des Chauves-Souris hématophages, qui peuvent du reste servir de «réservoir» de virus.

C’est sans doute par la considérable quantité d’insectes nocturnes qu’ils détruisent que les Chiroptères jouent le rôle économique le plus utile. En outre, dans certaines régions tropicales, les énormes accumulations d’individus dans les cavités souterraines fournissent une quantité appréciable de guano, utilisé comme engrais.

Systématique

Les Chiroptères se répartissent en deux sous-ordres: les Mégachiroptères chez lesquels le 2e doigt comportant trois phalanges est indépendant du 3e doigt; les Microchiroptères qui ont au contraire le 2e doigt pourvu de deux phalanges étroitement associé au 3e doigt.

Les Mégachiroptères constituent une seule famille: les Pteropidae , dont tous les représentants habitent les régions tropicales et subtropicales. En font partie les grandes Chauves-Souris frugivores que sont les roussettes et les Pteropus .

Les Microchiroptères se divisent en une quinzaine de familles qui peuplent la totalité du globe, à l’exception des régions polaires. Parmi les plus communes, on doit citer: les Rhinolophidae , dont le genre Rhinolophus est des plus communs dans l’Ancien Monde; les Phyllostomatidae , chez lesquels on trouve des genres adaptés aux régimes alimentaires les plus variés (Trachops sud-américain, carnivore; Macrotus nord-américain, entomophage; Leptonycteris d’Amérique centrale, pollinivore ou nectarivore; Desmodus, Diphylla et Diaemus , tous d’Amérique tropicale, hématophages...); les Vespertilionidae , qui groupent de 300 à 400 espèces réparties dans le monde entier, parmi lesquelles le murin commun (Myotis myotis ), l’oreillard (Plecotus auritus ), la pipistrelle (Pipistrellus pipistrellus ), la grande sérotine (Vespertilio serotinus ), sont très communs en Europe.

chiroptères [ kirɔptɛr ] n. m. pl.
• 1838; cheiroptères 1797; de chir(o)- et -ptère
Zool. Ordre de mammifères placentaires adaptés au vol grâce à leur membrane alaire. chauve-souris. Au sing. Un chiroptère. — On dit aussi CHÉIROPTÈRES .

chiroptères ou chéiroptères
n. m. pl. ZOOL Ordre de mammifères communément appelés chauves-souris, adaptés au vol grâce aux membranes de leurs membres antérieurs qui forment des ailes. Les grands chiroptères sont frugivores, les plus petits généralement insectivores.
Sing. Un chiroptère ou un chéiroptère.

⇒CHÉIROPTÈRES, CHIROPTÈRES, subst. masc. plur.
ZOOL. Ordre de mammifères, comprenant plusieurs espèces de chauves-souris, dont les membranes reliant les phalanges très développées des membres supérieurs au corps et aux membres inférieurs permettent le vol. Temple (...) noir, enfumé, sale et malflairant (...) habité par les oiseaux de nuit et les cheiroptères (DU CAMP, Le Nil, 1854, p. 197) :
Le mécanisme de l'écholocation varie avec les espèces de chiroptères. Les sons et ultra-sons sont émis soit par la bouche, soit par les narines et sont recueillis par des pavillons auriculaires soit fixes, soit orientables. Leur précision est telle pendant la chasse des insectes dont se nourrissent la plupart des chauves-souris que l'une d'elles, (...) a capturé devant témoins dix moustiques en une minute et quatorze petites mouches (...) dans le même temps.
B. GÈZE, La Spéléologie sc., 1965, p. 164.
Prononc. et Orth. :[]; []. Pour la prononc. de l'initiale cf. chéiro-. Ac. Compl. 1842 et Ac. 1932 enregistrent chéiroptère. Cf. aussi BESCH. 1845, Lar. 19e et DG. Le reste des dict. renvoie à chiroptère. Étymol. et Hist. 1798 cheiroptère (CUVIER Hist. nat., p. 103 : Mammifères carnassiers volans ou cheiroptères); 1838 chiroptère (Ac. Compl. 1842). Composé de l'élément préf. chéiro-, chiro- et de l'élément suff. -ptère. Fréq. abs. littér. :25.

chiroptères [kiʀɔptɛʀ] ou chéiroptères [keiʀɔptɛʀ] n. m. pl.
ÉTYM. 1797, cheiroptères; de chiro-, chéiro-, et -ptère.
Zool. Ordre de mammifères placentaires, dont les membres antérieurs allongés portent des phalanges très développées soutenant une membrane formant aile; ils sont insectivores ou frugivores. Chauve-souris.Au sing. || Un chiroptère, un chéiroptère.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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